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Le Dernier Compte Par Dr. Gilbert Moujabber

Le Dernier Compte
Par Dr. Gilbert Moujabber

Dans un monde où tout se mesure en chiffres, il existe pourtant des nombres impossibles à comptabiliser : ceux des enfants qui comptent les étoiles avant d’être engloutis par la pauvreté. La faim n’est pas qu’un vide dans l’estomac, c’est un vide dans la justice, un trou béant dans la conscience, une cassure qui dévore les rêves sans laisser derrière elle que des corps fragiles et des mères épuisées, inventant des mensonges blancs pour retarder l’inévitable.

Un écrivain a raconté cette histoire :
“Ma sœur et moi nous endormions souvent le ventre vide dans notre enfance. Maman nous mentait en nous disant : ‘Comptez les étoiles, et nous aurons beaucoup de pain.’
Nous comptions jusqu’à l’épuisement, puis nous dormions… Ainsi, nos têtes restaient levées, même lorsque nous mourions de faim.
Ma petite sœur est morte, les yeux fixés sur le ciel. Maman m’a dit qu’elle avait fini de compter.
Le jour de ses funérailles, on nous a donné beaucoup de pain, mais ma sœur n’est jamais rentrée à la maison.
Elle me manquait pour que nous puissions jouer ensemble.
Maman, dis-leur de me rendre ma sœur et de reprendre leur pain. Je compterai à sa place, qu’ils me prennent moi…
Mais ils ont refusé. Et ma sœur n’est jamais revenue.”

Ce n’est pas une simple histoire. C’est une tragédie qui se répète, une plaie béante dans la conscience humaine. On ne meurt pas de faim, on meurt d’attendre. On meurt quand le pain arrive trop tard, quand l’aide devient un hommage posthume, quand la justice n’est qu’une formalité après la mort. Combien d’enfants la famine emporte-t-elle sous nos yeux avant qu’une main secourable ne se tende enfin ? Combien de fois l’humanité arrive-t-elle trop tard, n’ayant plus que des fleurs à déposer sur des tombes silencieuses ?

On dit que les mères mentent pour épargner leurs enfants de la faim, mais le vrai mensonge n’est pas celui des pauvres, c’est celui des riches. Ils mentent en disant que le monde ne peut pas nourrir tout le monde, alors qu’il jette la moitié de sa nourriture aux ordures. Ils mentent en nous faisant croire que la pauvreté est une fatalité, alors qu’ils ont bâti des lois qui concentrent les richesses d’un côté et laissent l’autre côté compter les étoiles jusqu’au matin.

La tragédie n’est pas dans la mort de cette petite fille, mais dans le fait que sa mort aurait pu être évitée. Elle n’aurait jamais dû compter jusqu’à la dernière étoile, le pain n’aurait jamais dû être une offrande funéraire. Pourtant, elle est partie, comme tant d’autres, pendant que le monde était occupé à compter autre chose : l’argent, les actions, les bénéfices… mais pas les enfants.

Au final, la petite fille n’est jamais revenue. Ils ne reviennent jamais. Mais devons-nous, nous, arrêter de compter ?

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