
“Qu’est-ce que la patrie ?” Une question posée un jour par Jean-Jacques Rousseau, qui a répondu : “La patrie est l’endroit où aucun citoyen n’atteint une richesse qui lui permet de racheter un autre citoyen, ni un citoyen n’atteint une pauvreté qui le force à vendre sa dignité ou son honneur.”
Mais si c’est cela la définition de la patrie, où se trouve alors le Liban dans ce concept ? Où est ce lieu qui offre à ses enfants la dignité avant le pain, la sécurité avant les slogans, et l’appartenance avant les intérêts personnels ? Le Liban est passé d’un pays dont ses enfants rêvaient à une prison à ciel ouvert, dont ceux qui peuvent fuir s’échappent, et ceux qui n’ont pas d’autre choix y restent.
Le Liban, qui devrait être le pain, le toit, la justice, et le sentiment de dignité, est devenu une terre où l’on vend et achète les pouvoirs, où une poignée de profiteurs règne, tandis que son peuple est laissé face à la pauvreté, à la privation et à la dévastation. Si Rousseau disait : “La patrie n’est pas seulement la terre, mais la terre et les droits ensemble, et si la terre est avec eux, que les droits soient avec toi”, que doit faire un peuple à qui on a volé sa terre et dénié ses droits, ne lui restant plus que de lutter pour sa survie ?
Dans ce contexte, le Dr. Gilbert Moujabber souligne que le Liban n’est pas seulement une terre, mais une volonté et une foi qui ne meurent jamais. Comme le dit Moujabber : “Le Liban est une idée qui ne meurt pas, une âme qui ne s’achète pas et ne se vend pas.” Il refuse ainsi de réduire le Liban à un simple terrain de corruption et de crise, affirmant que le Liban est la terre de la dignité, de la justice, et de l’esprit vivant, que l’espoir ne peut être volé, quelle que soit la difficulté.
La patrie n’est pas seulement la terre où l’on naît, mais le lieu où les enfants se sentent en sécurité, où la dignité est un droit et non un privilège, et où l’appartenance est un sentiment authentique, non une simple formalité. Comment la patrie peut-elle être une patrie si elle devient simplement une escale, si y vivre devient un combat quotidien contre la faim, la maladie et la corruption ?
Mais malgré tout, le Liban reste une idée plus profonde que ce qu’on peut réduire à un pouvoir corrompu ou à des circonstances difficiles. La patrie n’est pas seulement un gouvernement qui change, ni une crise passagère, ni une réalité imposée, mais une volonté d’un peuple qui refuse de se soumettre, une âme qui ne se vend ni ne se trahit, une vérité qui ne peut être effacée malgré toutes les tentatives de la détruire. Et comme Rousseau disait : “La patrie est là où l’on se sent bien”, il n’y a pas de véritable patrie si l’homme n’y est pas en paix, si la justice n’est pas son fondement, et si la dignité et l’appartenance ne sont pas des honneurs, mais des droits.
Nous écrivons aujourd’hui sur le Liban, non pas parce que nous avons perdu espoir, mais parce que nous croyons que les patries ne meurent pas, même si leurs blessures saignent depuis des décennies. Entre une terre prise sans droit et des droits volés par l’injustice, le droit restera toujours plus fort que ceux qui ont trahi la patrie, et la foi en le Liban est le seul pari que les loyaux ne perdront jamais.
Écrit par le Dr. Gilbert Moujabber